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Eric Letty

Editorialiste

Le macronisme frappé par la jaunisse

Benjamin Griveaux, porte-parole de l’actuel gouvernement, a été bien inspiré de reprendre à son compte la fameuse distinction maurrassienne entre le « pays réel » et le « pays légal » – qu’en sa grande sapience, il a attribuée à Marc Bloch… La rupture entre les« élites », autrement dit la caste politico-médiatique, et le peuple est aujourd’hui consommée. Trois France coexistent sans cohabiter. Celle des mégapoles et celle des« périphéries », gagnants contre perdants de la mondialisation, dont le géographe Christophe Guilluy a souligné l’opposition. Et à l’écart, en quelque sorte, la non-France issue de l’immigration de masse, la population des« cités » qui refuse l’assimilation à la nation française et en rejette la culture. C’est la France des périphéries qui fournit les gros bataillons des « gilets jaunes ». Les bénéficiaires de la mondialisation la toisent de haut sans essayer de la comprendre ; et les populations exogènes n’ont pas de part à cette révolte.C’est une des raisons de l’incompréhension du gouvernement devant ce mouvement. Par un réflexe conditionné, politico-pavlovien, Emmanuel Macron a promis d’octroyer des aides aux ménages les plus modestes, comme le « chèque énergie ». Autrement dit, l’État-Providence, dont lui-même constatait« l’échec » au mois d’août, émettra de nouveaux chèques sans provision, comme d’habitude payés in fine par les contribuables. Le président n’a rien compris. Les Français qui descendent dans la rue ne quémandent pas et ne veulent pas de l’assistanat. Cette France-là, qui travaille, demande au contraire que l’État cesse de la vampiriser et la laisse vivre normalement du fruit de son travail – alors qu’une étude d’Eurostat, publiée le 28novembre, montre que de toute l’Europe, notre pays est celui où la pression fiscale est la plus forte et qu’elle y a encore augmenté cette année. Macron s’en fout. Ce qu’il veut, lui, c’est précipiter la marche de l’Europe vers la mondialisation. À cette fin, la France n’est qu’un outil entre ses mains.Il feint aussi de s’indigner de l’« injonction paradoxale » qui consisterait à réclamer moins d’impôts et plus de services publics ;mais il se garde d’évoquer le paradoxe bien réel consistant à payer de plus en plus d’impôts pour de moins en moins de services publics, sans pourtant que les dépenses publiques diminuent. Où part l’argent ?Il y a trois France. Il y aura deux frontsLes Français demandent un geste : le renoncement à la hausse des taxes sur le carburant. Il ne le fera pas. La même mégalomanie qui le conduit à vouloir redessiner à son gré la carte de l’Europe, le convainc qu’il a été élu pour sauver la planète. Super Mac contre l’Apocalypse ! C’est lui le nouveau sauveur, le rédempteur. Mieux que Jupiter : un nouveau Christ ! Au passage, la transition économique lui permet de capter les trois quarts des taxes punitives pour renflouer le budget de l’État : le climat a bon dos. Aux Français qui lui parlent de leurs fins de mois, il répond en invoquant la « fin du monde ». Il viendra condamner, après cela, ses adversaires qui prospèrent prétendument sur la peur ! Autre signe de cette incompréhension entre le pouvoir et le peuple, les ministres Marlène Schiappa et Benjamin Griveaux ouvrent un deuxième front en annonçant que la PMA sans père sera votée en 2019, encore une fois contre le voeu d’une majorité des Français. Craignent-ils de manquer de manifestants dans les rues ?Nous avons un gouvernement autiste, àl’image de son président. Petitement éluvoilà un an et demi à la faveur d’un coup monté politique, judiciaire et médiatique, ce mondialiste buté se heurte aujourd’hui à une composante avec laquelle il n’avait pas compté : le peuple français. Décidément, l’hiver risque d’être chaud sur les Champs-Élysées ; et le réchauffement climatique n’y sera pour rien.

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