« Nous pensons qu’en France, le sursaut est possible, que les Français vont à nouveau s’aimer eux-mêmes et s’aimer entre eux, pour se redécouvrir tels qu’ils sont : viscéralement catholiques. »

Numéro en cours

Eric Letty

Editorialiste

Le calme dans la tempête

Condamnation du cardinal Barbarin, Primat des Gaules, pour non-dénonciation d’abus sexuels ; condamnation, en Australie, du cardinal Pell, accusé de s’être livré à des violences sexuelles– qu’il nie – sur des enfants de choeur ;ouverture d’une enquête visant le nonce apostolique en France à la suite de plaintes pour agressions sexuelles ;réduction à l’état laïc de l’ancien archevêque de Washington, Théodore Mc Carrick ; parution, en février, d’un livre consacré à l’homosexualité au Vatican ; diffusion, début mars, d’un reportage sur des abus commis par des prêtres sur des religieuses : l’Église est prise au coeur d’un maelstrom d’accusations, de condamnations et de révélations extrêmement graves, où le vrai et le faux se mêlent avec un effet ravageur.La barque de Pierre est submergée parce déferlement de scandales, comme dans le récit évangélique : « Et voilà que la mer s’agita violemment, au point que la barque était recouverte par les vagues. Mais lui dormait ».La mer, dans la Bible, est symboliquement associée à la mort et aux forces du mal. Ce sont ces forces qui sont à l’oeuvre. Ce n’est pas nouveau. Depuis l’origine, l’histoire de l’Église est jalonnée de semblables tempêtes, dont les dégâts sont importants et durables : la Réforme luthérienne aurait-elle connu un tel succès si la conduite des hommes d’Église avait été irréprochable ? La situation, toutefois, n’est pas la même. Au XVIe siècle, l’Europe était chrétienne. Aujourd’hui, en Occident surtout, elle a renié sa foi, le relativisme ambiant réfute la notion de vérité et la modernité a rompu avec l’enseignement catholique, notamment en matière de moeurs. À ces deux égards, l’Église représentait un rempart contre l’esprit du temps ; une large brèche y est aujourd’hui ouverte.Les conséquences en sont redoutables, d’abord pour l’évangélisation. La cathophobie qui sévit dans une large fraction de la société diffuse depuis maintes années une caricature de l’Église. Mais comment s’étonner que l’opinion publique se laisse abuser, si le comportement des catholiques, notamment de certains clercs parfois élevés aux plus hautes responsabilités, se prête à cettecaricature ? Une deuxième conséquence touche à la légitimité de l’enseignement de l’Église en matière de moeurs. Il suffira à ses détracteurs de citer les paroles de Jésus Lui-même à propos des scribes et des pharisiens : « Ils lient des fardeaux pesants, et les mettent sur les épaules des hommes, mais ils ne veulent pas les remuer du doigt. »La seule réponse possible, pour l’Église, réside dans un sursaut de sanctification et l’assainissement de ses institutions. C’est de cette manière qu’au XVIe siècle, elle avait répondu à la crise provoquée par la Réforme luthérienne.En cette période de carême, c’est la grâce que les catholiques doivent implorer auprès du Christ et de la Vierge Marie. Dans l’Évangile de la tempête apaisée, saint Matthieu témoigne : « Ses compagnons s’approchèrent et le réveillèrent en disant : “Seigneur, sauve-nous ! Nous sommes perdus”. Mais i lleur dit : “Pourquoi avoir peur, hommes de peu de foi ?” Alors, debout, Jésus interpella vivement les vents et la mer, et il se fit un grand calme. 

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