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Eric Letty

Editorialiste

La logique diabolique

Jamais projet de loi n’a aussi mal porté son nom que celui sur la « bioéthique ». Car l’éthique concerne la morale. Or, la question de la PMA sans père, qui n’est certes pas la seule importante dans le texte catastrophique présenté par le gouvernement, mais qui est centrale, ne pose pas une question de morale, mais d’essence : elle touche à l’être de l’être humain. Guillaume de Prémare et moi avions cité, dans notre livre Résistance au Meilleur des mondes, un texte de Jacques Attali, dans lequel cet homme du Siècle, ce conseiller des présidents, cet initié, annonçait le dernier épisode de la bataille en cours : le moment où l’homme sera créé en matrice artificielle. Attali ne mentait pas, c’est ce qui nous attend si nous laissons faire les puissances qui dominent ce monde. Son conseil était pervers, en revanche, lorsqu’il invitait les opposants au mariage inverti à renoncer à cette lutte pour se rendre directement, en sautant les cases en quelque sorte, à cet enjeu ultime du combat. C’est un mauvais avis, parce que nous avons affaire à une chaîne logique. Si l’on parvient à la rompre, tous les éléments s’en trouvent fragilisés. La loi Taubira sur l’union des homosexuels a été rendue possible par la fragilisation de la famille traditionnelle en tant que norme. La dissolution de ce modèle, en égarant les esprits, a préparé l’idée qu’il pouvait exister des mariages entre deux hommes ou deux femmes et que de telles « familles » pouvaient légitimement adopter des enfants. Exit la complémentarité de l’homme et la femme.Nous en sommes à la phase suivante : si deux femmes peuvent élever des enfants adoptés, ne serait-il pas préférable qu’elles les conçoivent et les portent elles-mêmes ? Et si les familles monoparentales deviennent un modèle comme un autre, pourquoi ne pas autoriser les mères célibataires à recourir elles aussi à la procréation médicalement assistée ?Exit le père. La prochaine étape est déjà engagée, avant même que la précédente ne soit atteinte :l’impératif d’égalité exige que ce qui est autorisé aux couples homosexuels féminins le soit aussi aux homosexuels masculins. Le recours aux mères porteuses, présenté comme« altruiste », voire « éthique » à en croire le secrétaire d’État à la jeunesse, Gabriel Attal, doit permettre aux faux pères de devenir des mères comme les autres. Reste que la mère porteuse ressemble à une poule pondeuse ayant forme humaine. Exit, non pas encore la maternité elle-même, mais le lien solide entre tous qui lie la mère au fruit de ses entrailles.Une fois ce lien brisé, la dernière étape irade soi. Il paraîtra même préférable, et plus humain, d’éviter aux mères porteuses le traumatisme de la séparation en fabriquant l’enfant hors de la chair, matériau peu sûr et quasiment animal.Voilà le but : faire de l’être humain un produit industriel comme un autre, susceptible à terme d’être commercialisé au même titre qu’un réfrigérateur. Mais la logique de cette évolution fait aussi sa faiblesse ; car en se battant sur chaque anneau de la chaîne, il est possible de ralentir ou d’interrompre le processus.Notre force, à nous, est dans le nom du Seigneur qui a fait de l’homme le sommet de sa Création. Le plan de recréation de l’humain, dans lequel s’inscrivent ces prétendues évolutions, ainsi que l’eugénisme et le transhumanisme, n’est que le bégaiement diabolique de la tentation originelle : « Vous serez comme des dieux ». L’histoire de l’humanité montre qu’elle n’est pas à prendre à la légère, mais que cette illusion de puissance finit toujours par s’écrouler. Ceux qui n’en sont pas dupes se réuniront à la Manif pour tous et aux mouvements qui en sont issus, pour lutter. Et que l’on ne nous parle pas de violence ; car rien n’est plus violent que le monde que l’on nous promet.

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