« Nous pensons qu’en France, le sursaut est possible, que les Français vont à nouveau s’aimer eux-mêmes et s’aimer entre eux, pour se redécouvrir tels qu’ils sont : viscéralement catholiques. »

Numéro en cours

Eric Letty

Editorialiste

La gauche mal endimanchée

Il existe deux lectures de la loi Macron, qui, en augmentant sensiblement le nombre des dimanches travaillés, élargit aux dimensions d’une brèche la fissure déjà ouverte dans le principe du repos dominical. (Les 35 heures, en revanche, restent intouchables…).

La première lecture est d’ordre politique : pour battre en brèche ce principe, auquel Nicolas Sarkozy n’avait pas osé toucher, le gouvernement socialiste a dû engager sa responsabilité devant les députés et affronter une motion de censure – sans grand danger, il est vrai, car les élus socialistes tiennent trop à leur siège pour la voter. Reste que le pouvoir est aujourd’hui si peu sûr de sa majorité qu’il doit utiliser l’article 49-3 pour lui imposer ses choix. Pour convaincre d’éventuels récalcitrants, leur patron à l’Assemblée, Bruno Le Roux, leur a d’ailleurs mordu les mollets : « voter contre le gouvernement, voter contre la majorité, c’est interdit ! » Le temps est loin où, sous le gouvernement de Dominique de Villepin, l’actuel président de la République considérait le recours au 49-3 comme « un déni de démocratie », et où le parti socialiste envisageait sa suppression. Aujourd’hui, François Hollande tranche : « On n’avait pas de temps à perdre, ni de risques à prendre ».

Quels risques, au fait ? Manuel Valls craignait-il seulement les défections qui se seraient produites dans son propre camp, ou de se ridiculiser, en ayant finalement gain de cause contre une partie de sa majorité grâce à des voix venues de la droite ? Car le repos dominical fait bouger les lignes. Hervé Mariton se retrouve ainsi sur les mêmes positions que Manuel Valls, et Henri Guaino que Martine Aubry, qui rappelle que « la société de consommation n’est pas un but en soi. Le dimanche, c’est un jour pour la famille, les amis, l’art et la culture ». Il assez paradoxal, en effet, que le même gouvernement qui n’a de cesse de chanter les vertus du « vivre ensemble », casse ce puissant instrument de cohésion familiale et sociale. Valérie Trierweiler, sans doute désireuse de nuire à son ex-concubin, a toutefois trouvé les mots justes dans un message « gazouillé » sur le réseau Tweeter : « Ma mère travaillait le dimanche, elle n’avait pas le choix. Que ces dimanches étaient tristes. Nous attendions son retour pour vivre. »

En face, Emmanuel Macron est un bébé-Attali et la gauche qu’il promeut est celle de son mentor, mondialiste, matérialiste et ultra-libérale : la gauche de « l’homme nomade ». C’est à elle aussi que se raccrochent Manuel Valls et, moins bruyamment, François Hollande. Cette gauche-là n’aime pas la famille, nous avons eu l’occasion de le constater depuis le début du quinquennat. Elle n’aime pas non plus le peuple français, ni la France. Le repos du dimanche est aussi sacrifié aux desidarata bruxellois.

La deuxième lecture de la loi Macron, qui n’exclut pas la première, a trait à un choix de civilisation et aux racines chrétiennes de notre pays, que ce texte contribue à arracher. Martine Aubry, qui n’a certes jamais compté parmi les amis de l’Eglise, a omis de préciser que le dimanche est aussi, et d’abord, le jour du Seigneur, « jour de grâce et de cessation du travail », dit le Catéchisme. Comme le rappelait un numéro récent de Monde et Vie, ce n’est pas la première fois, dans l’histoire, que les ennemis du catholicisme tentent de le « laïciser ». Après une longue bataille, la droite catholique et sociale n’obtint qu’il devienne chômé qu’en 1906, quelques mois après la grande spoliation de 1905, en quelque sorte comme un lot de consolation. Il est significatif que le gouvernement revienne sur cet acquis, au moment où Claude Bartolone proclame la supériorité de la religion républicaine sur toutes les autres. Ils ont commencé une guerre de religion.

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