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Abbé de Tanoüarn

Rédacteur en chef

Quelques folies contemporaines

« Le monde doit savoir que François Hollande est un grand président » déclare Manuel Valls au Congrès du Parti Socialiste à Poitiers. Notre Premier ministre, qui tremble toujours autant de la main gauche, ne se rend même pas compte du ridicule de cette déclaration de groupie. Ou bien « François » (il aime qu’on l’appelle comme le pape) est un grand président et tout le monde le sait ou il n’a simplement pas la carrure, comme on le murmure un peu partout (vox populi, vox Dei) et ce n’est pas la peine de pérorer comme si nous n’étions pas dans la mandature la plus calamiteuse de la Vè République… Mais tout se passe comme si la parole s’était substituée à la réalité. Il y a le réel que l’on ne veut pas voir (il est trop triste) et la parole qui apprivoise, modifie, déforme, contredit le réel et qui doit seule être prise en considération. Valls n’aura jamais été autant applaudi (il faut les voir) que pour cette ineptie. Mais justement dans la lutte contre le réel, plus quelque chose est inepte, plus c’est courageux de le dire ! Ce que les militants socialistes ont applaudi, c’est le courage de Manuel Valls face au réel et contre le réel…Cette détestation du réel, je n’ai que l’embarras du choix pour l’illustrer encore et encore… L’art contemporain présente souvent une détestation maniaque du réel. Alors que l’art jusque-là cherchait à aller de l’apparence au réel (voir l’entretien avec Laurent Dandrieu), l’art contemporain (ou plutôt l’art officiel abscons) va du réel à l’apparence. Dernier exemple en date cette histoire saugrenue du Vagin de la Reine dans les Jardins de Versailles. Intitulée Dirty corner (le coin de saleté), l’œuvre est censée signifier « un espace d’obscurité » affirme l’artiste anglo-indien Anish Kapoor. Alfred Pacquement, commissaire de l’exposition à Versailles déclare lui-même : « Je ne sais pas pourquoi on en parle. En tout cas, l’artiste ne m’a jamais parlé du “vagin de la Reine” à propos de cette oeuvre». Il a suffi d’une blague douteuse dans un journal à grand tirage pour que les passions se déchaînent. Comment arbitrer ? L’art contemporain est en effet uniquement affaire d’apparence. Le réel n’existe pas. La blague devient le réel…Attentat contre le réel ? Dans le genre, il y a aussi la déclaration de Yann Moix dans le Figarovox. Celle-là il faudrait l’archiver, je n’en donne qu’un extrait : « Je suis inadapté à la famille. Je déteste en voir, en croiser. La notion de famille m’agresse. Quand il y a plusieurs personnes d’une même famille dans une pièce, tout cet ADN regroupé me donne la nausée. Pour moi, être à table avec ses parents, c’est déjà de l’inceste. Quand mes amis ont des enfants, je ne les vois plus jusqu’à ce qu’ils en soient libérés. » Ce texte est monstrueux. Pourtant, vous savez, ce n’est pas le mauvais bougre, Yann Moix. Il a écrit un Mort et vie d’Edith Stein, qui vaut mieux qu’un navet. Mais il ne sait simplement plus où il habite, qui il est. Le culte du Moix lui a fait perdre le sens du réel… Cette détestation de la famille est en même temps une détestation de la chair de l’homme. Le gnostique, le cathare ne sont pas loin de ces perspectives. Ce qui est charnel est quelque chose du mal : « C’est des liens du sang que sont venus le racisme, la monarchie absolue. La vraie révolution, la vraie égalité totale, ce serait de mélanger les bébés à la naissance comme dans La vie est un long fleuve tranquille. On devrait interdire aux parents d’élever leurs enfants biologiques. Cette manière de placer son ego dans sa chair me donne le vertige. » La chair est mauvaise. Seuls existent, dit-il, mon Ego (hors sol), mon image (hors chair), mon apparence. Yann Moix ? Un chef-d’œuvre de l’art contemporain. On va bien rigoler l’année prochaine, quand il remplacera l’ineffable Aymeric Caron dans l’émission culte de Laurent Ruquier. Le réel risque de se rappeler à son bon souvenir plus d’une fois…    

Abbé G. de Tanoüarn 

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