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Eric Letty

Editorialiste

Le pape de la miséricorde

Le dimanche 27 avril auront ou auront eu lieu (selon le moment où mes lecteurs liront ces lignes), en présence du pape François et de son prédécesseur le pape Benoît XVI les canonisations des papes Jean XXIII et Jean Paul II. Appartenant à la « génération Jean Paul II », je suis plus sensible à la seconde, qui intervient le dimanche de la divine Miséricorde, fête que le nouveau saint créa en accomplissement de la demande adressée par Jésus à sainte Faustine, religieuse polonaise que Jean-Paul II avait canonisée en 2000. Ce pape mourut lui-même, par grâce, pendant les vêpres de la divine Miséricorde, signe accordé à notre époque et à notre monde, qui a tant besoin de la Miséricorde.
C’est sans doute l’un des plus jolis mots de la langue française, qui m’a valu, dans ma jeunesse, de lire un beau roman de l’excellent Pierre Mac Orlan, attiré par ce titre que je trouvais d’une mystérieuse beauté : l’Ancre de miséricorde, dont l’intrigue se déroule dans le vieux Brest des bagnards et des pirates.
Mais c’est surtout le plus beau nom de l’Amour de Dieu pour nous les hommes, si incompréhensible dans sa gratuité, sa patience et sa fidélité.
Je crains que toutes les cruautés des pirates et des bagnards du temps jadis n’aient été moins pécheresses que nos crimes raisonnants, dégoulinant de fausse morale et d’humanisme fourvoyé. Les gentilshommes de fortune que le bourreau accrochait au gibet avaient massacré et pillé, mais jamais prétendu faire de l’homicide un droit de l’homme ou de la femme, à la manière de Najat Vallaud-Belkacem, dont la loi punit le « délit » d’entrave à l’avortement, ou du nouveau ministre de l’Education nationale, Benoît Hamon, dont les services ont ordonné l’ouverture d’une enquête administrative visant le lycée Gerson à Paris, établissement privé catholique où des catéchistes auraient osé qualifier le meurtre de l’enfant dans le ventre de sa mère d’« homicide volontaire ». Brûlera-t-on demain le Catéchisme de l’Eglise catholique ?
Feu la morale « laïque », vernie d’égalitarisme, sous-tend et imprègne le rapport intitulé Filiation, origines, parentalité, dont a accouché un groupe de pseudo-spécialistes présidé par la sociologue Irène Théry. Il y est question, entre autres, de l’ouverture de la procréation médicalement assistée aux duos de lesbiennes, de la reconnaissance des enfants nés à l’étranger par GPA (autrement dit le recours aux mères porteuses), du rôle du beau-parent dans l’éducation de l’enfant au sein des familles recomposées et d’une évolution du droit afin de prendre en compte « la grande métamorphose de la filiation, et plus généralement de la famille et de la parenté, dans les sociétés occidentales contemporaines ». Qu’en termes technocratiques ces choses-là sont dites !
Ce qui est recherché, c’est la mise au rancart du modèle familial traditionnel, c’est-à-dire des fondations les plus naturelles et les plus solides de la famille. L’hypocrisie du pouvoir socialiste est telle qu’il n’a pas voulu endosser la responsabilité du rapport, tout en le laissant publier. Les parlementaires de gauche (avec probablement l’appui d’une partie de la droite) se chargeront de s’en inspirer et de le débiter en tranches pour les servir sous forme de propositions de loi. Un premier texte, relatif à l’autorité parentale, a déjà été déposé le 1er avril.
Dans son encyclique Dives in misericordia, publiée en novembre 1980, Jean Paul II exprimait le « vibrant appel de l’Eglise à la miséricorde dont l’homme et le monde contemporain ont un si grand besoin (…) même si souvent ils ne le savent pas ». Puisse le nouveau saint intercéder pour nous l’obtenir.

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