« Nous pensons qu’en France, le sursaut est possible, que les Français vont à nouveau s’aimer eux-mêmes et s’aimer entre eux, pour se redécouvrir tels qu’ils sont : viscéralement catholiques. »

Numéro en cours

Eric Letty

Editorialiste

Pour une France jeune et « raide »

Samedi 25 mars, en l’église Saint-Augustin, le cardinal Sarah a donné une conférence sur la défense de la vie, à l’occasion du 23e anniversaire de la mort du professeur Jérôme Lejeune. Le préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements a décrit la dimension eschatologique de la bataille engagée contre Dieu et les hommes par « le dragon infernal rouge feu à sept têtes », les forces de mort et le « Goliath des puissances financières et médiatiques, lourdement armé et protégé par la cuirasse de ses fausses certitudes et par les nouvelles lois contre la vie », en face duquel « l’Église constitue le dernier rempart contre la barbarie ».Je mesurais, en l’écoutant, la distance sans mesure qui sépare ce combat, dont nous sommes l’enjeu, de l’ahurissante médiocrité du spectacle politicien qui nous est actuellement présenté. Les sujets de civilisation qui engagent notre avenir sont systématiquement exclus de ce débat en toc, dont les protagonistes ne semblent s’intéresser qu’aux salaires de Pénélope et aux costumes de François Fillon, ou aux manœuvres des hiérarques socialistes comptant sur Emmanuel Macron pour sauver leurs gamelles. Alors que le pays traverse une crise de régime latente, un nombre croissant de Français se détournent avec dégoût de cette politicaillerie-là et du théâtre de marionnettes poussiéreux auquel elle se réduit en France. Un entretien entre Natacha Polony et Marion Maréchal Le Pen, le 30 mars sur la chaîne Paris Première, est venu meubler un peu ce vide. Pour une fois, on a entendu parler de politique au sens noble du mot – car on en vient à oublier que la vraie politique est un noble service, où le pape Pie XI voyait « la forme parfaite de la charité ». Le débat entre la journaliste et l’élue frontiste était sans doute biaisé par l’approche de l’élection présidentielle. Sur le sujet de l’avortement, en particulier, la parole n’est pas libre. Marion Maréchal Le Pen n’hésite-t-elle pas à déclarer que c’est un « drame » (le cardinal Sarah parle d’« un crime, et donc le plus grand drame de notre temps ») et que cet acte ne doit plus être remboursé intégralement. Il faudrait, allant plus loin, poser la question de fond : a-t-on le droit de supprimer une vie humaine en développement ? Voilà près de vingt ans de cela, Michel Poniatowski, qui fut avec Giscard d’Estaing le grand responsable de la légalisation, plus encore que Simone Veil, m’avait répondu : « Oui, je l’ai bien fait pendant la guerre ! ». Nous faisons donc la guerre à nos propres enfants… Les conceptions politiques  que Marion Maréchal Le Pen a par ailleurs développées au cours de cet entretien appartiennent à la vraie droite, la seule qui tienne, héritière du courant légitimiste et du catholicisme social qu’avait incarnées en son temps le comte de Chambord, et gardienne d’un ordre politique construit sur les communautés naturelles et les corps intermédiaires, à mille lieues de l’étatisme et du jacobinisme. C’est ce qui me conduit à la solution monarchique, à la différence de Marion Maréchal Le Pen. Du moins habitons-nous en politique, sinon la même maison, du moins le même quartier et la même rue. Ce n’est pas le cas de Marine Le Pen, et c’est sans doute pourquoi elle trouve sa nièce trop « raide ». Sa candidature représente, à mon sens, un moindre mal dans la situation catastrophique du pays, menacé de perdre son identité par l’immigration de masse et sa souveraineté au bénéfice des eurocrates bruxellois. Souhaitons toutefois à la France de redevenir dans un proche avenir aussi jeune et aussi « raide » que Marion.  

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