« Nous pensons qu’en France, le sursaut est possible, que les Français vont à nouveau s’aimer eux-mêmes et s’aimer entre eux, pour se redécouvrir tels qu’ils sont : viscéralement catholiques. »

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Christophe Mahieu

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Une encyclique, des nouveautés

Le 16 juin prochain, le pape François publie sa première encyclique, Laudato si (Loué sois tu). Un texte magistériel original qui montre une volonté de se démarquer de ses prédécesseurs.

Nous sommes le 19 mars 2013 sur la place Saint-Pierre. Au cours de son homélie prononcée à l’occasion de la messe d’installation du pontificat, le pape François marque sa différence avec les mots suivants : « La vocation de garder [le Christ dans notre vie] ne nous concerne pas seulement nous les chrétiens, elle a une dimension qui précède et qui est simplement humaine, elle concerne tout le monde. C’est le fait de garder la création tout entière, la beauté de la création, comme il nous est dit dans le Livre de la Genèse et comme nous l’a montré saint François d’Assise : c’est le fait d’avoir du respect pour toute créature de Dieu et pour l’environnement dans lequel nous vivons.» Contre l’individualismeDès le lendemain, les médias n’ont pas manqué de souligner cette affirmation, mais en omettant un élément essentiel de ce discours. Pour le pape François, il ne s’agit pas seulement de préserver l’environnement, mais aussi l’humanité elle-même. Une écologie humaine donc aux conceptions assez larges puisqu’il s’agit aussi bien de protéger la planète contre un capitalisme destructeur que de donner un statut à l’embryon ou de reconnaître la dignité des personnes en fin de vie, ce qui écarte tout recours à l’euthanasie. Chez le Jésuite devenu pape, il s’agit aussi d’entretenir au sein des familles, à l’égard des personnes les plus fragiles un sentiment filial et fraternel. Combien de fois François a répété au cours de l’Angélus que la jeunesse devait se tourner vers les personnes âgées qui, dans la vie utilitariste des sociétés occidentales, sont laissées de côtés : « La vie humaine, la personne, n’est plus considérée comme une valeur primaire à respecter, en particulier si elle est pauvre ou handicapée, si elle ne sert pas encore – comme l’enfant à naître – ou si elle ne sert plus – comme la personne âgée. Cette culture du rebut nous a rendus insensibles également aux gaspillages et aux déchets alimentaires, qui sont encore plus répréhensibles lorsque dans chaque partie du monde malheureusement, de nombreuses personnes et familles souffrent de la faim et de la malnutrition. »L’encyclique du pape François, qui est le premier texte écrit exclusivement de sa main (1), reprendra  l’ensemble des thématiques déjà développées dans ses interventions publiques comme la dénonciation de la culture du déchet, de l’utilitarisme ou de l’individualisme propres aux sociétés capitalistes. Laudato si sera donc à placer dans la tradition des textes de la doctrine sociale de l’Eglise de Léon XIII (Rerum novarum) à Benoît XVI (Caritas in Veritate) en passant par Paul VI (Populorum Progressio). Néanmoins, la question purement écologique – préservation de l’environnement – sera une nouveauté pour une encyclique. Il s’agira donc de voir la part que le pape argentin donne à cette aspect si particulier, dans la perspective de la conférence des Nations unies sur le climat, organisée à Paris en fin d’année.On peut aussi se demander si Laudato si ne sera pas au pontificat de François ce que Pacem in Terris avait été sous le pontificat de Jean XXIII : l’encyclique centrale du règne, illustrant les options d’un pape qui tient malgré tout à se démarquer par son originalité. Benoît XVI ayant publié une encyclique sociale dans le contexte de la gigantesque crise économique mondiale, le sujet était pour ainsi dire épuisé. On le sait, François n’est pas un théologien et écrit très peu, ce qui réduit par ailleurs sa marge de manœuvre. D’autant plus qu’il ne cesse d’annoncer que son rè­gne sera court. Son modèle, Jean XXIII, a publié huit encycliques en cinq ans de règne ! Mais il avait une formation d’historien… Reste donc ce thème de l’écologie, thème médiatique et « périphérique » par excellence, bien éloigné de la pédagogie de Benoît XVI qui, lui, au fil de ses encycliques, avait étudié les trois vertus théologales.      

Christophe Mahieu

1 Lumen Fidei avait été exclusivement rédigé par Benoît XVI mais publié dans les premières semaines du pontificat de François.

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