« Nous pensons qu’en France, le sursaut est possible, que les Français vont à nouveau s’aimer eux-mêmes et s’aimer entre eux, pour se redécouvrir tels qu’ils sont : viscéralement catholiques. »

Numéro en cours

Eric Letty

Editorialiste

Des conclusions « incisives » du synode

Le synode pour la famille a rappelé, comme l’a dit le pape François lui-même, «  l’importance de l’institution de la famille et du mariage entre un homme et une femme, fondée sur l’unité et sur l’indissolubilité et à l’apprécier comme base fondamentale de la société et de la vie humaine », ce qui est essentiel. Le discours prononcé par le Saint-Père en conclusion de ces travaux me laisse néanmoins un sentiment de malaise, qui tient sans doute à la médiatisation dont ce synode a fait l’objet, mais aussi aux divisions qui sont apparues dans l’Église et au ton même de ce discours, que le site de Radio Vatican a qualifié d’«incisif ». Je n’oublie pas, en écrivant ces lignes, que le pape est le successeur de Pierre, l’élu du Saint Esprit, un homme de foi et de prière donné par Dieu à l’Église pour la conduire. Sur le fond, nous saurons sans doute bientôt sur quels chemins il veut emmener les couples chrétiens. Mais je n’ai pas aimé sa manière de morigéner ceux dont le point de vue diffère du sien, en leur reprochant de vouloir « endoctriner » l’Évangile « en pierres mortes à lancer contre les autres », d’avoir des « cœurs fermés qui souvent se cachent jusque derrière les enseignements de l’Église ou derrière les bonnes intentions pour s’asseoir sur la cathèdre de Moïse et juger, quelquefois avec supériorité et superficialité, les cas difficiles et les familles blessées », d’user de « méthodes pas du tout bienveillantes », alors que, dit-il, « les vrais défenseurs de la doctrine ne sont pas ceux qui défendent la lettre mais l’esprit ; non les idées mais l’homme ; non les formules mais la gratuité de l’amour de Dieu et de son pardon ». Vise-t-il par ces propos les évêques qui redoutent de desservir la famille et de fragiliser les familles en acceptant ce que Mgr Pontier décrit, dans un texte émerveillé, comme une « petite révolution » ? Ceux qui défendent la doctrine – et savent que, pour paraphraser Bernanos, ce n’est pas eux qui gardent la doctrine, mais la doctrine qui les garde – succombent-ils nécessairement à un « endoctrinement » ? Ceux qui, enfants prodigues, croient que la miséricorde n’est pas séparable de la loi divine, sont-ils forcément suspects de vouloir « distribuer des condamnations ou des anathèmes » ?Et que voulait le pape François en convoquant ce synode ? Bénéficier des avis de ses pairs, eux aussi successeurs des apôtres, ou disposer d’une assemblée de « bénis-oui-oui » prêts à lui donner carte blanche ? La réflexion utile et nécessaire sur les conditions de l’accueil et la place dans l’Église des divorcés remariés, sur l’approche du saint Sacrement par les pêcheurs que nous sommes tous, sur le bien des familles et le salut des âmes, souffre, comme paraît le déplorer le pape, de s’égarer dans un débat idéologique qui peut l’empêcher de porter tous ses fruits. Je ne crois pas que les défenseurs de la tradition en soient seuls responsables.C’est au pape François qu’il appartient désormais de trancher. Aux catholiques, il appartient de prier pour lui et de garder confiance. Le Saint Esprit veille toujours sur Son Église.  

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